Chine, un « disjoncteur » de marchés qui sème la zizanie

CapdeChine 08012016Les marchés chinois sont tourmentés en ce début d’année, contrariés par de nouvelles initiatives prises par les autorités chinoises. L’essai d’instaurer un « circuit-breaker » (« disjoncteur ») – déclenchant soit une suspension de séance de 15 minutes en cas de baisse de 5 % du Hushen 300 Index (reflétant la performance des bourses de Shanghai et de Shenzhen), soit la clôture de séance en cas de chute de 7 % – partait pourtant d’une bonne intention. L’objectif était de restaurer la confiance des investisseurs échaudés par le krach des actions A (cotées en Chine continentale) de l’été 2015 et d’éviter des fluctuations de cours trop erratiques… L’effet a été inverse.

Draineur de liquidités
Lancé le lundi 4 janvier, le mécanisme en question a été retiré dès le jeudi soir 7 janvier. Entre-temps, celui-ci a provoqué une série de vagues de ventes, deux clôtures anticipées des bourses chinoises continentales en moins d’une semaine (le 4 janvier et le 7 janvier), et, par ricochet, un repli de 4,66 % du Hong Kong Hang Seng Index entre le 4 et le 7 janvier.
En étant très rapprochés l’un de l’autre, les plafonds déclencheurs du « disjoncteur », de respectivement 5 % et de 7 %, ont joué l’effet d’un aimant. Il ont incité une ruée des investisseurs à la vente, pressés de se dessaisir de leurs positions baissières, en anticipation d’une éventuelle clôture de séance, drainant de facto les liquidités de marchés.

Révision des conditions de ventes d’actions A réalisées par les grands actionnaires
Cela dit, deux autres facteurs ont alimenté ce mouvement recul boursier, des interrogations d’investisseurs concernant l’ampleur de la dépréciation du Renminbi ainsi que des inquiétudes quant aux effets de l’expiration de l’interdiction de vente d’actions A effectuées par les grands actionnaires. Ces craintes devraient s’estomper dans les jours à venir car la China Securities Regulatory Commission (CSRC) vient d’édicter (jeudi 7 janvier, après clôture) de nouvelles règles à ce sujet : Si les ventes d’actions des grands actionnaires sont à nouveau possibles, en revanche, elles ne pourront pas dépasser 1 % de la capitalisation totale de l’entreprise cotée pendant une période de trois mois. Ensuite, leur programme de cession devra être divulgué 15 jours à l’avance.

Stabilité des fondamentaux économiques
Certains observateurs mettent en outre ce nouvel accident de marché sur le compte d’une dégradation notable des fondamentaux économiques chinois. Or, ce point n’est pas avéré. « Certes, la publication du dernier PMI confirme la faiblesse de la demande (notamment extérieure) qui pèse sur l’activité manufacturière déjà morose en Chine. Néanmoins, elle ne constitue pas une vraie surprise pouvant entraîner une chute du marché des actions aussi violente, » commente Bei Xu, global strategist chez Exane Derivatives.
L’experte ajoute : « Sur le plan macroéconomique, nous maintenons notre conviction d’absence de détérioration et d’amélioration notable de l’activité au premier trimestre 2016. L’ajustement des surcapacité de production chinoises pourrait durer tandis que les mesures favorables à l’offre ne produiront pas des effets immédiats. » Et de conclure, la correction spectaculaire des actions A de ce début d’année « est plus liée à un aspect technique qu’à une dégradation surprise des fondamentaux. »
L’an qui démarre, placé sous le signe de la poursuite des réformes des marchés de capitaux chinois, et par conséquent rythmé de multiples tests techniques … ne sera pas de tout repos pour les investisseurs enclins à la panique.

(A propos des fondamentaux économiques de la Chine, lire : « Cinq défis de la Chine en 2016 » : http://www.lazuli-international.com/cinq-defis-de-la-chine-en-2016/)