L’ASEAN, nouvel eldorado des exportations de Hong Kong

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Hong Kong n’est pas seulement une gigantesque place financière. La Région administrative spéciale de la République populaire de Chine aux prés de 7,24 millions d’habitants est aussi une plate-forme commerciale effervescente.
Quinzième plus grand exportateur mondial de services commerciaux, elle est la huitième plus importante économie commerciale, avec un total de 1011,80 milliards de dollars (US) de marchandises commercialisées en 2014. Entre janvier et avril 2015, ses exportations se sont élevées à 144,6 milliards de dollars, en hausse de 2,3 % d’une année sur l’autre, tandis que ses importations ont augmenté de 0,3 % à 164,8 milliards de dollars.
« En 2015, la valeur des exportations devrait croître de 3 %, » anticipe Nicholas Kwan, directeur de la recherche du Hong Kong Trade Development Council (HKTDC), analysant la progression de 1,9 point à 46,8 de l’indice de prévision « HKTDC export » pour le deuxième trimestre de 2015.

Le moteur américain
« Bien que la croissance mondiale ait été stagnante au premier semestre, les conditions de marché actuelles laissent penser que l’environnement extérieur s’améliorera dans la deuxième partie de l’année, » commente Nicholas Kwan.
L’un des moteurs principaux de la progression attendue est le dynamisme de l’économie américaine. Le dynamisme de cette dernière a déjà largement soutenu les exportations du « port au parfum » : Entre janvier et avril, les exportations de Hong Kong vers les États-Unis se sont accrues de 6,2 % (d’une année sur l’autre) à 104 milliards de HK dollars. L’Amérique du Nord est notamment le relais majeur du marché des montres à Hong Kong, en particulier de celles de mode, de haut de gamme et dotées de gadgets électroniques. L’intérêt vif des Américains pour l’ensemble de ces articles tranche avec la timidité persistante des Européens ou des Japonais. Les consommateurs de Chine Continentale, quant à eux, continuent de rechercher des produits de qualité. Cependant, leurs ardeurs demeurent contraintes par la campagne anti corruption du gouvernement chinois.

Les yeux rivés sur le Mékong
L’autre levier du commerce hongkongais est l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est). Cette région a contribué à 89 milliards de HK dollars d’exportations entre janvier et avril, soit une hausse de 15,2 % (d’une année sur l’autre). Selon les données du Census and Statistic Department de Hong Kong, la progression des exportations a été spectaculaire avec la Thaïlande (de 19,7 %) et avec le Vietnam (de 16,2 %).
« Les liens économiques inter-régionaux se resserrent. Les compagnies étrangères continuent d’investir dans les pays de l’ASEAN, tandis que les réformes structurelles et les investissements en infrastructure stimulent l’activité de ces pays, » explique Daniel Poon, économiste principal du HKTDC.
A plus long terme, l’initiative d’envergure « One Belt, One Road » (« Une ceinture et une route ») devrait encourager les coopérations économiques entre la Chine et la région du Mékong, autrement dit la « Great Mekong Sub Region » (GMS). (Voir la carte ci-dessous) Celle-ci devrait bénéficier du projet de créer la « route de la soie maritime du vingt-et-unième siècle » reliant la Chine et les pays asiatiques du sud-est, mais aussi de la fonction de l’Asian Infrastructure Investment Bank (AIIB), de fournir des fonds aux pays d’Asie les moins développés.
Ces éléments devraient en particulier profiter à la Thaïlande et au Vietnam. Ce pays « dispose déjà d’une base de production relativement bon marché, » relève Dickson Ho. L’économiste principal du HKTDC observe que les fabricants étrangers qui y sont installés sont « très demandeurs de parcs immobiliers industriels, d’entrepôts, d’installations logistiques. A ce titre, les investisseurs étrangers ne regardent pas seulement les grandes villes d’Ho Chi Minh City et de Hanoi. Ils s’intéressent aussi aux régions en train de s’urbaniser rapidement, telles la province de Bình Dương au sud-est du Vietnam ou de Bắc Ninh au nord. »
Toutes ces perspectives de croissance attrayantes dans l’infrastructure et dans l’immobilier devraient « offrir de belles occasions d’affaires au Vietnam aux entreprises de Hong Kong spécialisées dans les services liés à la construction, l’ingénierie, la planification et la gestion de projet, » conclut Dickson Ho.
Hong Kong jouit déjà de la demande croissante venant des pays de l’ASEAN, en réalisant, par exemple, de bons chiffres d’exportations dans les jouets. « La population de la classe moyenne s’y accroît, tout comme les taux de naissances, » expose Daniel Poon, recommandant toutefois aux fabricants du secteur de surveiller la sécurité, la qualité et la conception (« design ») de leurs produits.

Le plus grand entrepôt de la Chine Continentale
L’autre acteur incontournable de l’export hongkongais est bien sûr la Chine Continentale. Entre janvier et avril 2015, cette dernière a importé 605 milliards de HK dollars de marchandises (près de six fois plus que les États-Unis), un chiffre en hausse modérée de 1,1 % (d’une année sur l’autre), reflétant le ralentissement de la croissance de son économie.
Quoi qu’il en soit, Hong Kong demeure sans conteste « l’entrepôt industriel le plus grand de la Chine Continentale », selon le HKTDC. D’après les statistiques du gouvernent de la HKSAR (Hong Kong Special Administrative Region), en 2014, 60 % des réexportations de Hong Kong ont été d’origine chinoise et 54 % ont été destinées à la Chine Continentale. Selon les statistiques des China’s Customs, Hong Kong est son deuxième partenaire le plus important, après l’Amérique du Nord, en représentant 8,7 % de la totalité de ses échanges commerciaux en 2014.
Cette proximité est à la fois un atout, une force et une contrainte. Elle oblige les entreprises exportatrices du « port au parfum » à s’adapter en permanence à la modification des besoins des industriels chinois voisins. Pénalisés par une augmentation des coûts du financement et de la main d’œuvre, ceux-ci ont réformé leur chaîne d’approvisionnement afin de minimiser les dépenses opérationnelles et accroître leur compétitivité. Certains ont même délocalisé leurs base de production dans d’autres régions.

S’adapter à la transformation chinoise
Les effets de cette transformation s’observent dans la fabrication d’habits et le textile hongkongais, désormais en quête d’un positionnement différent. Cette remise en question ne s’effectue pas sans difficulté.
Les entreprises de ce secteur « sont confrontées à une augmentation des retards de paiement de très longue durée », précise Rocky Tung, économiste Asie-Pacifique de Coface, en charge d’étudier également l’évolution des risques de paiements des entreprises. Il détaille : « 45,3 % des spécialistes du textile répondants à notre dernière enquête nous ont déclarés que les retards de paiement de plus de 180 jours, c’est-à-dire de très longue durée, représentaient plus de 2 % de leurs chiffres d’affaires annuels. Et, 17 % de ces répondants subissent des retards de paiement de longue durée correspondant à 5-10 % de leurs revenus annuels. »
L’activité du secteur du textile est fortement exposée « au dynamisme du commerce, et, la plupart de ses procédures industrielles sont associées à la production installée dans la province du Guangdong en Chine Continentale, » décrit Rocky Tung. C’est ainsi, témoigne-t-il, qu’une « société basée à Hong Kong, avec des installations dans le Guangdong employant 4 000 personnes en période de pic d’activité, nous a indiqués qu’elle n’investirait plus en Chine pour l’instant. En revanche, elle envisage, à l’image d’autres acteurs du secteur, la construction d’une autre usine dans l’un des pays d’Asie du Sud Est, tel le Vietnam. »
Une fois de plus, la capacité d’adaptation des entreprises hongkongaises est testée. Nul doute que nombre d’entre elles seront relever ce défi.

(Repris par www.lepetitjournal.com/hong-kong ; Le Petit Journal de Hong Kong )

Les pays et régions du « Great Mekong Sub Region » (GMS) :
Le long du bassin du fleuve Mekong
Cambodge
Laos
Myanmar
Thaïlande
Vietnam
La province chinoise du Guangxi
La province chinoise du Yunnan

Carte du Mekong, source HKTDC