Basée à Hong Kong, Seeing Cheung, vice-présidente adjointe chez SHK Private, décrypte les marchés financiers de Chine continentale et de Hong Kong.

Seeing Cheung analyse le programme économique de la Chine pour 2017. Elle dévoile aussi les thèmes majeurs abordés lors de la conférence annuelle du National People’s Congress (NPC), qui se tiendra les 4 et 5 mars à Pékin. (Available in English)


Trois défis majeurs pour la Chine en 2017  (15/02/2017)

« La priorité des autorités chinoises sera d’assurer la stabilité sociale, économique et financière. Elle souhaitent aussi observer un rééquilibrage des revenus entre les ménages des mondes urbain et rural. »

seeing-cheung_page Quelle sera la priorité de la Chine pour 2017 ?

La priorité des autorités chinoises sera d’assurer la stabilité à tous les niveaux, en particulier avant la tenue du 19ième Congrès national du Parti communiste chinois (en novembre 2017). Il faudra maintenir la paix sociale tout en modérant la croissance économique, éviter la formation d’une autre bulle spéculative sur le marché immobilier susceptible d’éclater rapidement dans les grandes agglomérations du pays (« Tier One » et « Tier Two »). A Pékin notamment, une nouvelle politique hypothécaire vient d’être imposée aux banques, qui limite la durée des emprunts à long terme adossés à une deuxième prêt immobilier à 25 ans, contre 30 ans auparavant. Le gouvernement chinois a dit à plusieurs reprises que les maisons disponibles se destinaient à l’habitation et non à des échanges spéculatifs sur le marché. De plus, les autorités chinoises ne veulent pas répéter la même erreur que lors du krach des actions A (cotées en Chine continentale) de 2015. Toujours dans cette optique de stabilité, les autorités chinoises veilleront à ce que la dépréciation du renminbi par rapport au dollar ne déclenche une crise de confiance, susceptible de provoquer des sorties de capitaux massives du pays. Ce guidage est d’autant plus complexe à mener que les autorités monétaires souhaitent que le renminbi suive son indice de référence, le China Foreign Exchange Trade System (CFETS), panier de devises composé des principaux partenaires commerciaux du pays. Le poids du dollar dans le CFETS a déjà été abaissé à 22,4 % au premier janvier, contre 26,4 % précédemment.

Comment expliquez-vous la récente hausse des taux sur le marché monétaire ?

Cette récente petite hausse (d’un dixième de point) des taux à court terme sur le marché monétaire décidée par la People’s Bank of China (PBOC, la banque centrale de Chine) – intervenue le 3 février, au retour de vacances des Chinois – a surpris et a marqué les esprits. Un tel mouvement n’avait pas été observé depuis quatre ans. Pour autant, ce resserrement s’explique justement par la nécessité de défendre le renminbi contre la hausse du dollar. La deuxième raison de cette décision de la PBOC est la poursuite de la lutte contre la « finance de l’ombre » (« shadow banking), dont il faut absolument freiner l’essor, et, à nouveau, de maintenir la stabilité du système financier chinois. Dans cette optique, d’autres interventions monétaires de ce type devraient intervenir au cours de l’année.

Quel sera l’objectif de croissance du PIB chinois cette année ?

Un taux de croissance du PIB d’environ 6,5 % pourrait être ciblé en 2017 (à comparer à 6,7 % en 2016), en s’appuyant sur la progression des activités de services et de la consommation domestique des ménages. Cet objectif devrait être confirmé et détaillé lors de la conférence annuelle du National People’s Congress (NPC), qui se tiendra début mars à Pékin. Cet événement devrait aussi être l’occasion de confirmer les objectifs de rationalisation du secteur manufacturier le plus pollueur, d’investissements afin de lutter contre la forte pollution du pays et de réaménager le territoire. Les autorités souhaitent observer un rééquilibrage des revenus entre les ménages des mondes urbain et rural, dont les écarts se sont accrus. Cette initiative devrait passer par un renforcement des connectivités entre les diverses régions du pays, au moins en développant les possibilités de transport. A l’heure actuelle, il faut trois jours de train pour voyager de Shenzhen à la région du Xinjiang (4 600 kms environ), ou, 8 heures d’avion, soit une heure et demi de moins seulement qu’un vol allant de Hong Kong à Sydney ! Ce projet d’intégration des régions correspond à l’initiative OBOR (« One Belt, One Road » / « Une Ceinture, Une Route ») et, c’est d’ailleurs dans ce cadre que le gouvernement central de Xinjiang prévoit, par exemple, de dépenser 1 500 milliards de renminbi en infrastructure cette année.


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